VILLE
D'ANNECY
De l'audit du secteur socioculturel à la transformation
d'une politique culturelle
La politique culturelle de la ville d'Annecy a fait l'objet de
plusieurs démarches d'évaluation permettant à
la municipalité de mesurer les résultats atteints
et, dans certains cas, orienter son action en affirmant ses objectifs
et en prenant en considération les recommandations produites
à l'issue des études ainsi conduites.
Après un travail de réflexion interne accompagné
par l'Observatoire des Politiques culturelles, la ville a décidé
de consulter des cabinets spécialisés pour analyser
en particulier les difficultés financières rencontrées
par les Maisons des Jeunes et de la Culture. S'apercevant rapidement
que les questions à traiter étaient plus larges,
plus stratégiques qu'un simple audit financier, la municipalité
a également souhaité que ces études permettent
d'établir des recommandations prenant en compte la mise
en uvre de trois principes de base, identifiés à
l'issue de la première mission d'évaluation de la
politique culturelle annécienne conduite par P. Jacquier,
et auxquels la ville est attachée :
- maintenir une vision globale et à long terme de l'action
et du développement global
- maintenir le pluralisme et le dialogue
- s'adapter à l'environnement et à la conjoncture.
Jean-Claude Wallach, et son EURL "Arts, culture et développement",
a été retenu pour mener une évaluation des
missions et du fonctionnement des équipements socioculturels
d'Annecy, opérer une recherche de compétences et
d'identités nouvelles.
DEMARCHE : Évaluation concertée
La démarche proposée consistait tout d'abord à
replacer le positionnement des équipements dans le contexte
historique de l'éducation population et des politiques
culturelles de démocratisation de la culture. Ce cadre
de référence :
- fournissant d'importants points d'appui pour la formulation
de critères d'évaluation de la réalité
du fonctionnement et des activités des équipements
socio-culturels à étudier ;
- permettant de dédramatiser les diverses situations en
les replaçant dans les logiques historiques et sociologiques
qui contribuent à expliquer les difficultés rencontrées
;
- garantissant une meilleure pertinence des préconisations
finales et une mise en uvre de dispositifs d'évaluation
permanente des résultats.
La méthodologie de travail comprendra trois phases :
1) Délimitation des objectifs
La mise au point d'un document de référence avec
la ville commanditaire permettra d'expliciter correctement la
mission aux responsables des équipements concernés,
puis de les informer dans le cadre d'une première étape
de concertation.
2) Audit des équipements
L'évaluation des actions conduites ainsi que des capacités
techniques, financières et humaines des équipements
se fera selon une double approche, interne (point de vue des structures)
et externe (point de vue de la municipalité), permettant
de comparer et combiner les diverses représentations.
De même, seront croisées des analyses sur les publics
des équipements avec des données socio-démographique
sur la population, afin de mettre évidence le degré
d'adaptation des activités proposées aux publics
visés.
Une étude des comptes sur trois ans permettant de déceler
les choix d'orientation budgétaire permettront de placer
face à face les moyens et les objectifs.
3) Processus de redéfinition des missions de chaque
équipement
Associant dans une démarche de concertation les responsables
municipaux et les responsables associatifs, la restitution des
travaux s'organisera de manière pédagogique, afin
que la rédéfinition des missions des équipements
soit l'aboutissement d'une négociation et le fruit d'une
appropriation des résultats par chacun des acteurs.
Le but concret, facilité par une assistance technique du
consultant, est alors d'aboutir à des textes fixant les
contenus et modalités des nouvelles missions : conventions
de cogestion et cahiers des charges.
EFFETS : Nouveau projet et mise en uvre des moyens de la
préfiguration et de la création d'un nouvel équipement
La ville d'Annecy, et en particulier Marie-Noëlle Provent,
maire adjoint chargée des affaires culturelles, identifie
deux effets principaux de la mission d'évaluation, l'un
concernant directement les équipements et leurs responsables,
l'autre la politique culturelle municipale.
" Très rapidement, le consultant a appelé notre
attention sur les deux aspects suivants :
- Le récent dépôt de bilan de la MJC des Marquisats
ne découlait pas seulement de réelles difficultés
de gestion, mais aussi d'une profonde crise d'identité
et de projet qui n'a fait que confirmer la nécessité
de préciser à nouveau les missions du secteur socio-culturel.
- La politique culturelle municipale était certes diversifiée,
ambitieuse et dotée de moyens budgétaires importants,
mais il fallait que la Ville assume l'ensemble de ses responsabilités
en définissant ses objectifs propres, en hiérarchisant
ses priorités et en incitant les institutions et les associations
à coopérer et à fonctionner en réseau.
Nous avons pris les décisions suivantes :
- L'équipement des Marquisats serait affecté à
l'école d'arts d'Annecy et à un projet fort portant
sur les musiques amplifiées.
- Les missions de service public, définies avec précision,
combinant fonctions de centralité et actions de proximité
seraient négociées avec les associations gestionnaires
des équipements socioculturels. "
Le fait d'évoquer un projet portant sur les musiques amplifiées,
secteur mal connu des élus et services de la ville amènera
à constater l'existence d'une centaine de groupes musicaux
sur l'agglomération, demandeurs de ce type de services.
En visitant le Florida d'Agen et en constatant que selon le directeur
de cet équipement, un an de préparation avait été
nécessaire pour "labourer le terrain" et faire
en sorte que dès l'ouverture les usagers soient présents,
un chef de projet a été recruté par la ville
d'Annecy, et un concours d'architecture et d'ingéniérie
a été lancé.
Le chef de projet a dès lors joué un rôle
de médiation entre toutes les personnes intéressées
par le projet : musiciens, associations, institutions, médias.
Ceci a permis de faciliter la communication entre tous les acteurs
locaux concernés, d'identifier précisément
les demandes, de rendre compte de ces demandes à la commission
culturelle de la ville et évacuer progressivement les craintes
générées par ce type d'activité dans
les représentations du maire, des élus et des directions
techniques, comme les nuisances sonores ou les manifestations
de violence.
Les compétences techniques spécialisées du
chef de projet ont également permis de conférer
au projet des orientations fonctionnelles correspondant au plus
près aux contenus visés : accueil et convivialité,
répétition, information et documentation, formation,
diffusion.
De nombreuses actions de préfiguration autour de la diffusion
et de la formation seront mises en place en collaboration avec
les équipements culturels et les associations de la ville,
jusqu'à l'inauguration du "Brise Glace" en septembre
1998, avec une salle de concert de 500 places, 7 studios de répétition,
un espace d'information et de conseils pratiques, de formation
et de création
pour un investissement de 14 MF.
L'ensemble du processus a donc permis de passer d'un audit d'équipements
rencontrant des difficultés à une démarche
d'élaboration concertée d'un projet, ambitieux et
fédérateur de pratiques. En confiant aux équipements
socioculturels de quartier des missions artistiques et culturelles
de centralité, complétant celles assumées
par les grands équipements existant, on a cherché
à susciter une nouvelle dynamique et à atteindre
des couches de la population peu ou mal desservies précédemment
par une politique culturelle locale pourtant déjà
riche et diversifiée. |
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